C’est une petite fille, prise deux !

20 semaines de grossesse. Échographie fœtale. Je suis dans la salle d’attente.

 

C’est le moment de savoir si nous accueillerons une petite fille ou un petit garçon. 

Un dévoilement anodin qui pourtant prend énormément de sens pour la plupart des parents. Je n’ai rien à dire là-dessus, je fais partie de celles qui sont fébriles à l’idée de connaître le sexe de mon bébé. 

Je me souviens de ce jour où la technicienne m’a annoncé que ma première était une fille. Les mots ont résonné dans mon esprit longtemps, puis les suivants se perdaient dans la salle, sans que je les intercepte. C’était une chance sur deux, mais c’était la chance que je voulais. Je voulais ma Flora. « Une petite fille. Je vais avoir une petite fille. » C’est ce que je me suis répété toute la journée. J’étais sur un nuage. 

Nous voilà, presque deux ans plus tard et l’évènement est sur le point de se répéter.

Sauf que cette fois-ci, je n’ai pas envie d’entendre « petite fille », bien au contraire.

Je veux « le petit couple ». Une fille, un gars. Je veux vivre ces deux expériences et, bien que je ne suis pas du type à acheter des vêtements expressément genrés, je ne peux m’empêcher de rêver à des petits habits masculins. 

Je veux voir mon chum avec son fils. Je veux faire des soirées de girls pendant qu’il fait des soirées de boys. Je veux aller au spa avec ma fille pendant que mon chum joue au golf avec son gars. 

C’est idiot, non ? Cliché ? Stéréotypé ? Trop genré ? 

Non. Ce n’est pas idiot. C’est une préférence, et celle-ci me hante tellement que j’ai peur de réellement savoir ce qu’il en est.

Parce que c’est 50/50. Pile ou face. 

Comment vais-je réagir si j’entends ce que je n’ai pas envie d’entendre ? Je ne veux pas être déçue. Ni pour moi ni pour le petit être qui n’a rien demandé dans mon ventre. 

La vraie question que je me pose, c’est : si c’est une fille, vais-je quand même être capable de l’aimer ?

On appelle mon nom. C’est mon tour. 

Papa est avec moi alors que je me dirige vers la salle décisive. 

Le cœur, les jambes, les bras, le crâne, la vessie, les reins… tout va bien. Bébé est en santé. Voilà une première préoccupation de réglée. 

« Voulez-vous savoir le sexe du bébé aujourd’hui ? »

« Oui »

Et vite que je me fasse à l’idée. 

La technicienne fait quelques vérifications pendant que j’observe la petite crevette qui se tortille dans mon ventre.

Le petit être que je suis en train de créer tète son pouce. Son profil est différent de celui de sa sœur à ce stade-là. Je souris. J’en oublie presque pourquoi nous sommes là. J’ai devant moi le petit bébé auquel je vais donner vie. Le petit bébé que je vais porter dans mes bras. 

Je ne peux pas déjà lui demander d’être quelque chose qu’il ou elle n’est pas… je ne peux pas déjà avoir des attentes personnelles envers lui ou elle, à ce petit être tellement, tellement innocent.

C’est si bruyant dans ma tête que je ne me rends pas compte que la nouvelle est finalement annoncée: 

« C’est une petite fille ! » 

Papa et moi nous nous regardons. On sourit. On reste dans le silence pendant que la technicienne nous explique les détails du sexe du bébé. On nous remet les photos de l’échographie et on quitte.

J’ai envie de pleurer, mais je ne sais pas encore pourquoi.

 Ce n’est pas de la peine… ni de la joie. C’est plus complexe que cela. 

Les larmes coulent d’elles-mêmes seulement lorsque nous sommes rendus dans l’ascenseur, en route vers la voiture. Bientôt, je ne peux plus retenir les sanglots et c’est seulement là que je comprends.

Je suis soulagée. 

Soulagée de ne pas être déçue. Soulagée d’être toujours en amour avec le petit bébé dont mes yeux ne peuvent se lasser alors que je tiens fermement les photos d’échographie entre mes mains moites. 

J’avais si peur d’être soudainement détachée, de regretter mon choix d’un deuxième enfant et de m’en vouloir d’avoir eu des attentes !

Je réalise que, en fin de compte, cette préférence n’était que ce qu’elle était : une préférence. C’est tout. Ce n’était pas un ultimatum. Ce n’était pas un « ça passe ou ça casse ». C’était une envie. 

Cette envie a rapidement pris le bord maintenant que je sais que j’aurai une deuxième petite fille. Je me retrouve à être aussi heureuse que la première fois. M’étais-je réellement demandé si j’allais l’aimer ? 

Je repense à l’autre jour où j’ai vu ma fille s’amuser avec une plus grande au parc. Bientôt, ce sera elle et sa petite sœur. J’imagine leur complicité. Je pense à tous les beaux moments que nous allons vivre ensemble. 

Finalement, fille ou garçon, cela n’avait aucune importance. Je m’étais fait du souci pour rien.